Sur la photo de gauche à droite : Sara-Maude Gendron, Xavier Mathieu Gagner, William Filion, Brooke Filion (bébé), Fylianne Lanciaux (propriétaire) et Philip Lanciaux (propriétaire)

La Ferme Réal & Philip Lanciaux, à St-Herménégilde,  a récemment été honorée, le 3 décembre 2025, d’un prix prestigieux saluant l’excellence de sa production annuelle à l’occasion du congrès de DeLaval VMSPRO 2025 à Saint-Hyacinthe.

Arianne Fontaine (nutritionniste), William Filion (gérant de troupeau), Philippe Grimard (assistant gérant de troupeau), Fylianne Lanciaux (propriétaire) et Philip Lanciaux (propriétaire)

L’entreprise agricole a annoncé sur sa page Facebook avoir reçu cette distinction, qui souligne « le travail, la passion et la constance » investis chaque jour dans ses opérations. Pour l’équipe, ce prix représente une reconnaissance des efforts déployés pour maintenir une production performante « année après année ».

Les propriétaires, Réal, Philip et Fylianne Lanciaux, ont remercié leur équipe, leurs partenaires et leurs soutiens, affirmant vouloir continuer à « avancer et se dépasser ».

Parmi une cinquantaine de fermes admissibles, la Ferme Réal & Philip Lanciaux s’est démarquée pour la première fois depuis l’intégration complète du système de traite robotisée DeLaval VMS V310. L’obtention du prix exige une précision et une stabilité de production tout au long de l’année, malgré certaines variations en fin de saison.

La ferme avait déjà remporté par le passé des prix de la Fédération des producteurs de lait du Québec. « À l’époque, ce qui comptait dans la production laitière, c’était le taux de protéines et non le taux de gras. Tout a changé dans notre façon de fonctionner lorsque le cœur du quota a été modifié », explique Philip. Ce changement s’est appliqué à l’ensemble des producteurs du Québec. Une transition qui aura pris de cinq à six ans à se concrétiser, notamment en raison de l’importance de la génétique pour favoriser certains attributs du lait.

Ils sont donc ravis d’obtenir aujourd’hui ce prix, qui souligne une fois de plus leur capacité à se démarquer grâce à leur approche spécialisée de la production laitière. À l’heure actuelle, la ferme produit de 1,8 à 1,9 kilo de gras par vache, et ils visent à atteindre les 2 kilos bientôt.

Leurs forces : organisation et savoir-faire

Ce qui leur a permis de remporter ce prix découle notamment de leur capacité à concentrer leurs efforts sur des tâches précises et stratégiques. La priorité de l’équipe demeure la gestion du troupeau et l’optimisation de la production laitière. Philip Lanciaux parle de l’importance de la constance:

Fylianne insiste sur le fait qu’il y a toujours des améliorations à apporter sur une ferme:

Bien que la ferme possède 1 200 acres de terres cultivables et 800 acres en forêt, 40 % des travaux au champ sont confiés à des entreprises régionales spécialisées, par exemple pour l’épandage de fumier, la production d’ensilage ou le bûchage dans les forêts en hiver. De cette manière, une équipe experte est mobilisée pour assumer une tâche précise dans les délais souhaités, sans perturber les horaires ni les responsabilités des employés consacrés exclusivement à la gestion du troupeau.

Même si la ferme dispose d’un garage pour entreposer ses tracteurs, la mécanique est en grande partie sous-traitée à des entreprises locales. Ainsi, les quatre employés à temps plein travaillent tous dans le même bâtiment : tout se déroule à l’intérieur de ce vaste rectangle.

La configuration rectangulaire du bâtiment contribue aussi à une efficacité remarquable : les animaux ne sont jamais transportés d’un établissement à l’autre. Pour l’alimentation, il suffit de préparer cinq mélanges chaque matin pour nourrir l’ensemble des 800 bêtes. Une routine qui ne prend qu’environ 1 h 30 à M. Dany Lanciaux, responsable du troupeau.

Le confort contribue également à la stabilité de la production laitière des vaches. Des matelas d’eau leur servent de coussins pour la sieste, une rareté dans l’industrie, bien que l’intérêt pour ce type de produit recommence à monter. Des brosses pour le dos, une ventilation constante, des espaces suffisamment grands pour bouger : tout est en place pour que le « spa des vaches » les détende dans leur quotidien.

Le fait d’avoir plus de robots de traite que nécessaire permet également aux vaches de ne pas attendre trop longtemps pour leur traite, ce qui contribue à réduire leur stress.

« Les animaux ici ont en moyenne six ans et demi d’espérance de vie avant de quitter la ferme. Une moyenne beaucoup plus élevée que dans les fermes du Québec, où l’on frôle plutôt les cinq ans ou cinq ans et demi », explique M. Filion, gestionnaire du troupeau. Il est fier de pouvoir dire que onze de ses vaches ont plus de dix ans, une rareté dans une ferme de production laitière et un signe du bien-être animal.

Une histoire d’expansion et d’innovation

La ferme a été fondée il y a plusieurs décennies. Au début des années 1990, elle comptait environ 90 vaches en lactation. Puis, au début des années 2000, l’entreprise a acquis plusieurs exploitations avoisinantes, jusqu’à traire dans quatre lieux distincts.

En 2008, la famille Lanciaux décide de rassembler l’ensemble du troupeau sous un même toit. À cette époque, trois à quatre bâtiments étaient encore utilisés pour loger les taures. Un virage technologique s’amorce alors avec l’arrivée des premiers robots de traite : quatre robots Lely A3 sont installés dans une zone dédiée à l’avant de la ferme, accompagnés de la construction d’un nouveau bâtiment de 250 pieds.

En 2015, l’entreprise poursuit son expansion. Un agrandissement supplémentaire de 250 pieds permet l’ajout de deux robots additionnels, toujours à la même extrémité du bâtiment.

Puis, en 2023, la ferme se modernise une fois de plus avec un important réaménagement intérieur. Une nouvelle section de 340 pieds vient s’ajouter aux 500 pieds déjà en place. Les robots de traite, arrivés en fin de vie après environ 15 ans d’utilisation — selon l’entretien qui leur est accordé, précise M. Lanciaux — doivent alors être remplacés. Quelques-uns ont pu être revendus à faible coût. Cet investissement majeur donne aussi à l’entreprise l’occasion de réévaluer la technologie la mieux adaptée à ses besoins actuels.

La ferme Réal & Philip Lanciaux, un bâtiment de 840 pied de longueur.

Regrouper toutes les opérations sous un même toit a amélioré grandement l’efficacité, notamment pour le travail d’équipe. « Lorsque tous les employés sont réunis au même endroit, il suffit de lever la main pour obtenir de l’aide. Ça nous évite toute une logistique », explique Philip.

C’est finalement le système DeLaval qui est retenu, notamment grâce à une fonctionnalité innovante, le DeLaval VMS V310 qui a fait pencher la balance. L’équipe Lanciaux souligne toutefois que les deux fournisseurs avaient leurs avantages et qu’ils étaient satisfaits des robots Lely A3 utilisés jusque-là. Mais lorsqu’il s’agit d’investir des montants importants, il est essentiel de choisir la technologie répondant le mieux aux besoins présents — notamment le test de progestérone, une information cruciale pour la reproduction.

Lors de ce dernier agrandissement, la ferme a entièrement revu sa structure interne. Trois robots demeurent à l’avant du bâtiment original, tandis que cinq autres ont été installés dans la nouvelle section, dans la continuité directe de l’édifice. Plutôt que de regrouper les vaches sans distinction de lactation, le nouvel aménagement permet désormais de répartir les animaux selon leurs caractéristiques…

  • 110 têtes en première lactation,
  • 130 têtes en deuxième et troisième lactation,
  • 100 têtes en troisième lactation et plus.

Cette division en groupes plus homogènes permet de mieux ajuster les rations alimentaires selon les besoins spécifiques de chaque catégorie. Cinq mélanges différents sont ainsi distribués devant les cinq enclos, une façon supplémentaire d’assurer la stabilité de la production laitière.

Mais, comme le souligne M. Philip, il n’existe pas un seul facteur miracle : « Une production de lait excellente et stable, c’est un ensemble de données, d’efforts combinés et surtout une équipe passionnée et dévouée qui donne le meilleur de son potentiel. »

La ferme compte aujourd’hui 340 vaches en production. Les robots ne fonctionnent pas à pleine capacité : chacun peut traire jusqu’à 60 vaches, ce qui permettrait éventuellement d’élever le troupeau à environ 480 têtes. La principale limite demeure l’achat de quotas. Comme pour toutes les fermes, l’acquisition se fait à hauteur de 6 % de la production existante par année. Il existe donc un décalage entre les objectifs de croissance de l’entreprise et l’obtention des droits de production nécessaires. À ce jour, la ferme détient 515 kilos de quotas.

La Relève Familiale : Assurer l’Avenir

Fylianne et son conjoint, William Filion, seront les prochains leaders de l’entreprise, étant déjà actifs à temps plein dans la gestion de la ferme. Les démarches de transfert sont longues, mais le processus est enclenché pour leur remettre l’exploitation entre les mains. M. Philip Lanciaux voit même déjà poindre la quatrième génération en pointant la petite Brooke, le bébé de trois semaines de Fylianne et William, endormie dans un chariot à proximité de ses parents. La famille a également un autre enfant, Jackson, âgé d’un an, à qui elle souhaite transmettre la passion pour la ferme familiale.

Fylianne Lanciaux suivi de Philip Lanciaux :

Fylianne, qui représente la troisième génération à reprendre la relève, ne se montre pas inquiète face à l’avenir. « Il s’agit de gérer une grande entreprise, avec des revenus et des employés, et je suis passionnée par les animaux, donc ça ne me fait pas peur », confie-t-elle.

Elle a dû, il y a quelques années, faire un choix déterminant quant à la reprise de la ferme familiale. Sans formation formelle en

La relève: William Filion, Fylianne Lanciaux et Brooke Filion

gestion de production agricole, elle a d’abord travaillé pendant sept ans comme directrice commerciale chez Gagné Lessard Sport à Coaticook, avant de s’investir à temps plein dans l’exploitation. Lorsqu’elle a eu la possibilité d’obtenir des parts de l’entreprise où elle travaillait alors, elle a dû réfléchir sérieusement — aimant les projets des de

ux organisations. C’est finalement le désir de poursuivre l’aventure familiale et son amour des animaux qui a pris le dessus.

M. Filion est originaire de Baldwin. Bien que son grand-père ait exploité une ferme de vaches à bœuf, ses parents, eux, ont travaillé dans l’érablière familiale plutôt qu’avec les animaux. Il a néanmoins développé très tôt une passion pour les vaches, dès l’âge de 10 ans, en travaillant sur des fermes de la région. Il ne croyait pas initialement que son avenir le mènerait à gérer une ferme laitière — et encore moins une exploitation d’une telle envergure.

Aujourd’hui, il se réjouit de cette tournure des événements et travaille activement à l’amélioration du troupeau. Il est également responsable de la gestion des robots de traite et de leur maintenance. Parfois, il effectue lui-même des réparations mineures, et d’autres fois, il procède aux mises à jour et correctifs nécessaires avec l’aide d’un technicien en visioconférence, qui se connecte à distance aux robots pour effectuer les ajustements requis.

M. Filion s’émerveille des avancées technologiques : elles lui ont déjà permis de continuer à opérer les robots à distance depuis les États-Unis lors d’un voyage d’affaires… de ferme, tout de même ! Passionné de vaches, il participe régulièrement à des événements de génétique bovine aux États-Unis et au Canada, à raison d’un à deux événements par année. L’an dernier, il s’est rendu au Wisconsin pendant deux semaines pour assister au World Dairy Expo.

William Filion parle de la gestion des robots de traite à distance :

Aucune inquiétude concernant la gestion de l’offre

L’équipe ne s’inquiète pas des potentielles négociations entourant la gestion de l’offre avec les Américains ni de son éventuelle modification. Philip Lanciaux raconte que, depuis son jeune âge, il entend son père discuter de possibles changements au système, sans qu’aucune transformation majeure ne se soit concrétisée. Selon lui, il vaut mieux continuer d’avancer et de consolider l’entreprise. Faire croître le troupeau demeure, à ses yeux, une façon d’assurer la pérennité de la ferme.

Il estime que si le quota laitier venait un jour à « tomber », les exploitations les mieux positionnées pour survivre seraient celles capables de produire de grands volumes de lait — et donc de gras. « Si on s’inquiète trop, on va toujours être arrêtés, et c’est là qu’on aurait un problème », souligne-t-il. Rien d’alarmant donc, malgré le fait que le plus récent agrandissement ait, à lui seul, coûté plus de 7 millions de dollars.

Partage et entraide dans le milieu agricole

La ferme est heureuse d’accueillir en tout temps des agriculteurs souhaitant vérifier le fonctionnement de certains équipements avant d’en faire l’achat. M. Lanciaux se dit disponible pour leur faire visiter les lieux et leur expliquer les réussites ainsi que les écueils de certains investissements, illustrant ainsi l’importance de l’entraide dans le milieu. La ferme sert également de lieu de démonstration pour les robots de traite DeLaval lorsque cela est demandé. Des visiteurs venus de l’international ou des deux coins du continent viennent parfois pour apprendre de leur expérience et partager des connaissances.

Philip est convaincu que la qualité de leur savoir-faire est en grande partie redevable aux employés de la ferme, qui travaillent avec amour et passion. Alors que certains font partie de l’équipe depuis plusieurs années, d’autres, plus récemment ajoutés, trouvent également leur compte et cultivent le désir d’améliorer constamment l’expertise de l’exploitation. La ferme peut ainsi compter sur Arianne Fontaine à titre de nutritionniste, Philippe Grimard comme assistant gérant de troupeau, Sara-Maude Gendron comme aide-soignante aux veaux, Xavier Mathieu Gagner comme responsable de troupeaux et Dany Lanciaux comme soigneur des troupeaux.

Projets à venir

Le prochain objectif de l’entreprise est la construction d’une pouponnière dans un nouveau bâtiment adjacent, un projet que M. Philip décrit comme « le dossier sur la table » et qu’ils souhaitent faire progresser rapidement. Cette nouvelle infrastructure représenterait un investissement estimé à 2 millions de dollars.

Avec une équipe passionnée, une relève prête à prendre les rênes et des projets ambitieux en développement, la Ferme Réal & Philip Lanciaux aborde l’avenir avec confiance. Misant sur l’innovation, le bien-être animal et un engagement familial solide, l’entreprise poursuit sa trajectoire vers l’excellence. Ce prix n’est pas une finalité, mais une indication que le meilleur reste à venir, confirmant la place de la ferme parmi les références de la production laitière au Québec.

Paranthèse explicative : le fonctionnement des quotas

Au Québec, la production laitière est régie par un système de quotas administré par les Producteurs de lait du Québec, sous la supervision de la Régie des marchés agricoles et alimentaires du Québec. Chaque quota représente le droit de produire une quantité précise de lait.

Les producteurs peuvent en acheter ou en vendre sur le marché centralisé des quotas, où les transactions se font mensuellement à un prix fixé par la Régie. La valeur du quota varie, mais se situe généralement autour d’environ 25 000 $ à 30 000 $ par kilo de matière grasse (dans le lait). Chaque ferme peut accroître sa production en rachetant annuellement un maximum d’environ 6 % de son quota actuel. Ce système vise à stabiliser les prix, assurer un revenu prévisible aux producteurs et maintenir l’équilibre entre l’offre et la demande.

Photo au congrès: page facebook de Fermes Real et Philip Lanciaux 

 

Photos : Claudia Ferland